La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, historique
La cathédrale primitive du diocèse de Vienne, mentionnée dès 314, appartenait au groupe épiscopal construit à l'intérieur de l’enceinte de la cité gallo-romaine, non loin de l’ancien forum et du temple d'Auguste et de Livie. Ce groupe était composé alors de plusieurs églises, du baptistère et de la maison de l'évêque.
Leur emplacement est à peu près localisé : l'église principale (l'ecclesia) sous la partie orientale de la cathédrale actuelle, à l'extrémité est de la place Saint-Paul, le baptistère, de plan circulaire ou octogonal, et au nord une église dédiée à sainte Marie. Le souvenir de ces premières églises fut perpétué au XIIIème siècle lorsque furent construites sur le flanc nord de la nouvelle cathédrale gothique trois chapelles qui donnaient sur le cloître des chanoines. Leur vocable pérennisait les titres des églises du groupe épiscopal : les Maccabées ou Saint-Maurice-le-Vieux, Saint-Jean (le Baptiste), Notre-Dame. Leur destruction ainsi que celle du cloître, dans les premières années du XIXème siècle, ont donné naissance à la place Saint-Paul.
En janvier 361, l'empereur Julien assista à la fête de l'épiphanie dans la cathédrale. Dès le Vème siècle, l'ecclesia fut placée sous le patronage des frères Maccabées. Au début du VIème siècle, vers 515, un monastère y fut établi par le roi burgonde Sigismond. Cette fondation fut en réalité l'oeuvre d'une grande figure du siège épiscopal de Vienne, Avit, qui peupla la nouvelle abbaye avec des moines venus de Vienne, où les ordres monastiques fleurissaient alors.
Au début du VIIIème, le culte des reliques des martyrs de la légion thébaine, saint Maurice et ses compagnons (entre autres Victor, Candide, Exupère : voir Saint-Victor de Marseille), fut introduit à Vienne : un petit édifice en forme de crypte fut construit à l'ouest de la cathédrale d'alors pour abriter les reliques des martyrs. Leur culte bénéficia de la piété et des largesses des souverains carolingiens puis des rois de Bourgogne.
Au début du IXème siècle, une communauté de chanoines régie par une règle fut créée. L'usage du vocable Saint-Maurice se généralisa peu à peu pour désigner la cathédrale, qui fut agrandie vers l'ouest d'un sanctuaire consacré au Sauveur et utilisé par le chapitre des chanoines. Le roi Boson (879-887), élu roi de Bourgogne et de Provence et qui résidait à Vienne, eut une dévotion particulière pour saint Maurice dont il fit rouvrir le reliquaire d'or et de gemmes. Il fut inhumé à Saint Maurice.
La cathédrale fut reconstruite entre 1030 et 1070 par l'archevêque Léger. L'archevêque de Vienne, Gui de Bourgogne (1119-1124) après avoir été élu pape sous le nom de Calixte II, fut couronné dans la cathédrale. Peu après il fit du siège épiscopal de Vienne la primatiale pour les six provinces ecclésiastiques du sud de la France. Entre 1130 et 1160 se fit une nouvelle campagne de construction dans le style Roman. Au XIIIème siècle, l'évêque Jean de Bernin (1218-1266) reprit les travaux en délimitant le nouveau périmètre agrandi de l'église.
Le 20 avril 1251, le pape Innocent IV consacra la cathédrale, dédiée définitivement à saint Maurice. Durant le XIIIème siècle, la construction progresse: triforium, fenêtres supérieures, voûtes de nef centrale, portails de la façade occidentale, chapelles latérales.
D'octobre 1311 à avril 1312, le Concile de Vienne convoqué par le pape Clément V se déroule dans la cathédrale. Ce concile œcuménique, en présence du roi de France Philippe IV, ordonna la suppression des Templiers. La nef et la façade furent achevées au début du XVIème siècle, et en 1529 la dernière pierre de la cathédrale fut posée.
En juillet 1548, le cœur du Dauphin François, fils de François Ier, fut déposé dans le choeur de la cathédrale. François III mourut en 1536 au château de Tournon, après avoir bu un verre d'eau à Lyon...
Le 20 mars 1561, les bandes de Réformés s'attaquèrent aux statues de la façade. Le saccage se poursuivit en 1562, par des compagnies huguenotes du baron des Adrets, puis en 1567 à nouveau par les Réformés. En juillet 1790, en vertu de la Constitution civile du clergé, l'évêché de Vienne fut supprimé : la cathédrale échappa à la vente des biens religieux nationalisés. Pendant la Révolution, elle fut un lieu de réunion d'assemblées populaires et patriotiques, et servit ensuite de grenier à fourrage, ou de casernement. L'église fut rouverte au culte en juin 1802, en tant qu'église paroissiale.En 1869, la tour nord fut détruite par un incendie.
Du haut de sa tour, Amalthée, tournée exactement au sud, tient son rôle de protectrice et d'initiatrice...
D'après le dépliant de l'office du tourisme
D'après la fiche de visite distribuée dans l'église
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cath%C3%A9drale_Saint-Maurice_de_Vienne
http://architecture.relig.free.fr/jalbum/vienne_isere/interieur/index2.html
http://medieval.mrugala.net/Architecture/Vienne%20-%20Saint%20Maurice/
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, la façade
La cathédrale médiévale, au cœur d'un quartier clos habité par les chanoines du chapitre, dresse sa façade sur un parvis précédé de plusieurs degrés, s'élevant au-dessus des bords du Rhône.
C'est la partie la plus récente de l'édifice, construite entre le XIVème et le XVIème siècle, dans le style gothique.
Elle présente deux tours, une grande baie à rose et lancettes et trois portails de style flamboyant, richement décorés. Les sculptures ornant les tympans et les niches ont été détruites lors des guerres de Religion, mais heureusement les riches sculptures des voussures sont intactes.
Le portail de droite se caractérise par le présence d'anges musiciens et de prophètes (fin du XIVème siècle).
Celui de gauche, dédié à la Vierge, présente des anges musiciens et des choristes qui célèbrent le couronnement de la mère du Christ (fin du XVème siècle).
Enfin, le portail central date de la fin du XVème siècle et présente des scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament, des prophètes et des rois. Au début de voussures, on remarque notamment des statues personnifiant l'Église (à droite) et la Synagogue (à gauche).
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, les cloîtres
Le groupe cathédral comprenait au moyen âge un baptistère (Saint-Jean), une église principale (des Maccabées) et une église Notre-Dame. L'église majeure fut reconstruite aux XIème et XIIème siècles.
Au XIIIème siècle, l'archevêque Jean de Bernin agrandit et suréleva l'église cathédrale dédiée à saint Maurice (fenêtres hautes et arcs boutant). Au XIVème siècle, des chapelles furent insérées entre les arcs boutant, des arcatures romanes furent alors placées au-dessus.
Jean de Bernin fit aussi construire pour les chanoines deux cloîtres séparés par la salle capitulaire et le réfectoire. les corbeaux des galeries sont encore visibles place Saint-Paul.
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, la chapelle Saint-Théodore
Le portail, autrefois surmonté de trois blasons, faisait communiquer la galerie nord du cloître de la cathédrale avec la chapelle fondée à la fin du XVème siècle par le chanoine Claude de Virieu et sa sœur Jeanne.
De part et d'autre, des inscriptions funéraires des XIIème et XIIIème siècles, insérées dans le mur, rappelaient les donations que les défunts avaient faites pour servir à l'entretien de l'église de Vienne les jours anniversaire de leur mort ou pour certaines fêtes.
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, l'intérieur
La construction du bâtiment actuel fut entreprise en 1130 dans le style roman.
De cette époque datent les parties les plus anciennes, à savoir la partie de la nef comprise entre la 5ème et la 11ème travée : arcades jusqu'au niveau du triforium, bas-côtés, les 59 chapiteaux et quelques éléments en remploi dans la construction gothique...
dans la nef de gauche au-dessus d'une porte un bas-relief représentant les Rois Mages devant Hérode et dans la nef de droite un bas-relief représentant l'Adoration des Mages...
dans le porche nord, trois statues monumentales du milieu du XIIème siècle représentent trois apôtres témoignant des échanges artistiques entre Vienne et Autun à cette période).
L'édification se poursuit au XIIIème siècle : le style devient alors gothique, comme en témoigne le chœur (dont l'abside est réédifiée sur le soubassement de l'abside de la construction romane),
le triforium, les fenêtres hautes et les voûtes de la nef centrale, les quatre travées occidentales avec les clés de voûte ornées des armoiries des familles ou des chanoines bienfaiteurs,
les chapelles latérales ouvertes sur les bas-côtés et quelques restes de monuments sculptés qui proviennent peut-être du jubé. Des chapelles qui s'ouvraient sur le cloître ne subsistent plus que la chapelle fondée en 1495 par Claude de Virieu.
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, le zodiaque
Depuis la plus haute antiquité, le zodiaque est une représentation du cycle de l'année. Au moyen âge, il a la même signification, mais il est christianisé. Souvent associé aux travaux de la terre, il se présente ici seul, en frise sculptée sur marbre, et se lit de droite à gauche. Une croix avec l'alpha et l'oméga, décentrée sur la gauche, manifeste la présence du "Christ" depuis les origines jusqu'à la fin des temps.
Chaque signe porte son nom gravé en latin au-dessus de lui. Petit détail : il manque celui de la Vierge.... (manque de place, ou ?) et la dénomination des symboles du Cancer et du Scorpion est inversée.
Ce calendrier de pierre comporte une autre originalité : trois groupes de signes ont été reliés entre eux, composant de petites scènes animées.
Le Verseau à l'aide d'une cruche donne de l'eau à un couple de poissons, la Vierge enveloppée d'un manteau porte la balance à deux plateaux, le Sagittaire en bonnet phrygien lance une flèche avec son arc contre le Capricorne qui la reçoit dans le flanc, et s'écroule sur les pattes avant.
A l'origine, la croix du Christ devait être au centre de la frise. Au moyen âge, le premier jour de l'année était, selon les régions, en mars ou en avril. En 1564, l'édit royal de Roussillon fixa uniformément le premier jour de l'année au 1er janvier. On modifia alors la disposition du zodiaque : le Verseau et le Poisson passèrent en tête de la frise, de l'extrémité gauche à celle de droite. Une légère rupture et un joint dans la pierre au-dessus du Verseau témoignent de cette modification.
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, les disciples d'Emmaüs
Les deux sculptures en remploi des disciples d'Emmaüs, situées de chaque côté de la porte latérale sud, font partie des plus anciennes sculptures romanes de la cathédrale.
On y reconnait le Christ à son nimbe crucifère, portant la musette et le bâton du marcheur sur l'épaule. Ses traits sont réguliers et beaucoup plus lisses, comme pour marquer sa plénitude. Il n'en est pas moins habillé comme les disciples, même s'il est un peu plus grand, et ses pieds sont alignés dans le même axe : accessibilité à tous à l'état christique ?
Le Christ se tourne vers les disciples et leur parle. L'un d'eux porte un livre et a les yeux tournés dans sa direction, l'autre porte un rouleau, symbole de la parole.
La cathédrale Saint-Maurice de Vienne, les chapiteaux
La "délivrance des justes"
A droite, un monstre à trois gueules prêtes à dévorer. Plus loin, Jésus tenant la croix rédemptrice, guide les justes au paradis. Ça, c'est la thèse officielle. Moi je pencherai plus pour les gueules représentant l'animalité. Les "élus", les "re-nés", c'est à dire les initiés, sortent de ces gueules.
Ou bien ce sont les "tré-passés, ceux qui sont passés par la mort, donc ceux qui savent. Tous ces gens, avec Adam et Ève en tête, suivent le Christ vers la porte du ciel...
Les végétaux
Sur la soixantaine de chapiteaux romans de la cathédrale, une moitié environ représente un décor végétal, l'autre moitié comportant des feuillages stylisés ornant ou illustrant des scènes figurées ou historiées. Pour la grande majorité, les feuillages dérivent du style corinthien. A Vienne, les sculpteurs avaient sous les yeux de multiples modèles romains. Cependant, ils n'ont pas fait de simples copies, mais de véritables créations à partir de thèmes antiques : les pommes de pins, ou la vigne, ou les fruits de l'aulne, entrent en scène.
Vigne : symbole de la connaissance, accès à l'ivresse mystique, souvent en début de parcours ou à la base d'un pilier. son rôle est d'enlever les barrières mentales empêchant la réception de l'enseignement spirituel. Arbre sacré des grecs anciens (mystères dionysiaques), elle représente aussi l'abondance de la vie et la renaissance après le passage à la mort. Le message ne passe pas par l'intellect, mais par le coeur.
L'aulne était un arbre magique : chez les celtes, c'est l'arbre sacré sous lequel jaillissaient les sources sacrées. Il est imputrescible, c'est pourquoi il est attribué à la symbolique de l'eau. Il est souvent placé sur un courant d'eau souterrain. Comme il est l'un des feuillus à rester en vie en hiver, il est considéré comme l'arbre de la vie après la mort. Son fruit est souvent pris pour une pomme de pin. Mais le pin (comme la grenade), même s'il ne pousse pas dans la région, était considéré aussi comme un symbole de la multitude et de la prolifération des oeuvres à travers les cycles de vie (culte de Cybèle).
Les hommes verts (green men)
Le motif de l'homme vert consiste en un visage, le plus souvent d'homme, formé ou entouré de feuilles et possiblement aussi de branches et de vignes qui peuvent sortir de la bouche, des oreilles ou des narines. Ces pousses peuvent porter des fleurs et des fruits.
Le symbole de l'homme vert est d'origine et de signification incertaine, bien que probablement païenne, de par sa longue histoire et ses connotations de divinité masculine liée à la nature. Il est lié au cycle de la nature et à la renaissance au printemps.
La résurrection de Lazare
Au centre, un personnage soulève de ses deux mains le couvercle du sarcophage de Lazare. Celui-ci apparaît nu, son linceul pend sur la paroi antérieure.
A l'angle gauche, le Christ le bénit de sa main droite. Derrière lui, un évangéliste tenant un rouleau tient sa main droite levée et ouverte.
A droite, Marthe et Marie, les soeurs. la vigne est représentée sous forme d'énormes grappes de raisins.
Le sacrifice d'Isaac
Isaac est couché sur un autel, les mains liées. A gauche, Abraham saisit l'enfant par les cheveux et brandit la lame qui va lui trancher la gorge.
Un ange arrête son geste et lui montre un bélier devant un homme aux mains en cornet sur les oreilles : que celui qui a des oreilles entende...
Une table est dressée, recouverte d'une nappe aux plis réguliers. Le Christ est au centre, il porte le nimbe crucifère. Il s'adresse à un homme à sa gauche, sa main droite levée. C'est Simon le pharisien, coiffé du bonnet des juifs. A droite un apôtre tient un morceau de pain et une coupe. Sous la table, une femme essuie les pieds du Christ avec sa chevelure....
David musicien
Le chapiteau est rempli de feuilles d'acanthes parmi lesquelles David est assis et joue de la vièle. "C'est la musique qui fit de lui un roi prophète, puisque c'est grâce à elle qu'il parvenait à toucher et à attendrir Dieu. Au moyen âge, David était le patron des musiciens."
La présentation des mages devant Hérode
Les rois mages s'avencent en direction d'Hérode. Tous trois, couronnés d'une tiare orientale, portent leurs présents destinés au roi qu'ils cherchent. Ils marchent, les pieds campés sur la voie symbolisée par une ligne ondulée. Deux d'entre eux, représentés de face, montrent du doigt une étoile en forme de fleur, située sur le tailloir au-dessus d'eux.
Hérode est assis sur un trône, avec un sceptre et une couronne. Il tend l'oreille vers un esprit qui lui susurre une ruse.
L'adoration des mages
A droite, Marie est assise de face, la chevelure voilée. Elle tient l'enfant sur ses genoux, c'est une Vierge en majesté. Le premier roi s'agenouille et offre un coffret rempli d'or. L'enfant porte un visage adulte, comme dans la représentation des vierges noires.
Au centre, le deuxième roi, encore dehors, offre de sa main gauche, sous un voile, la boite d'encens. Sa main droite montre l'étoile : une fleur à 4 pétales.
A gauche, le troisième roi, porteur de la myrrhe, s'avance.
L'entrée du Christ à jérusalem
La ville sainte est représentée par des architectures où alternent, sur les trois faces, tours à 3 étages et arcs sous lesquels se déploie le cortège.
Le Christ est monté sur une ânesse accompagnée de son ânon. Ses enseignements sont rappelés par le livre qu'il porte avec lui, tandis qu'il bénit la foule.
Les saintes femmes au tombeau
Sur fond alvéolé et surplombé par un motif architectural de tours et de remparts représentant Jérusalem, un tombeau vide dont le couvercle a disparu. Un pan de linceul est abandonné sur le rebord. Au-dessus, une lampe éclairée, symbole de résurrection. Un ange aux ailes déployées désigne le tombeau vide. Trois soldats casqués : deux semblent assoupis, l'autre s'enfuit. A droite s'avancent les saintes femmes portant des parfums destinés à embaumer le corps.
La Cène
Au centre, le Christ, plus grand que ses apôtres, donne une bouchée à Judas, qui tient une bourse de sa main droite. A droite, deux personnages : c'est le même apôtre représenté deux fois, d'abord penché sur le Christ dans un geste d'amour, puis redressé portant une coupe et la main gauche levée. Pour nous faire comprendre qu'il s'agit du même personnage (là, chacun interprètera le chapiteau comme il l'entend), les pieds ne sont représentés qu'une fois sous la table. Sur la nappe aux plis réguliers sont disposés pains et poissons.
Sur une ligne ondulée symbolisant le chemin, 11 apôtres entourent le Christ. Sa haute stature s'inscrit dans une mandorle, symbole de naissance et de résurrection. Ses pieds sont encore sur le sol, il bénit de sa main droite.
L'agneau pascal
Le symbole du Christ est entouré du lion et du boeuf ailés, soit une moitié du symbole des 4 vivants.
Crédits photos : Claude Mouchet et Claude Thieffine