La cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, historique
Saint Polycarpe de Smyrne, disciple de saint Jean, envoya saint Bénigne (Benignus : le bien bon) en Gaule au IIème siècle, avec saint Andoche, saint Pothin, saint Irénée, saint Andéol et saint Thyrse. Il fut reçu à Autun par saint Faust, père de saint Symphorien, et par sa sœur sainte Léonille de Langres (Ca fait beaucoup de saints tout ça. Ca manque un peu de nos jours…). Il évangélisa d’abord cette cité puis vint à Dijon où il subit le martyre vers l'an 179. Conservée au musée archéologique, une statuette de la fin du XVème siècle le représente portant les instruments de son martyre.
L’évêque de Langres, saint Grégoire, acceptant finalement les rumeurs de guérisons miraculeuses, autorisa le culte pratiqué sur l'emplacement de son tombeau, dans la nécropole gallo-romaine, en dehors et à l'ouest du castrum. Il fit dégager le sarcophage et aménager, vers 511, une petite chapelle voûtée, pour l’héberger. Il entreprit ensuite la construction d’une basilique, consacrée en 535.
La pierre où Bénigne avait eu les pieds scellés avec du plomb fut percée de petits creux. Les malades y versaient du vin ou de la bière dont ils se lavaient ensuite les yeux. Les guérisons furent innombrables et le culte du saint, déjà officiel, prit de l’extension. Les pèlerins affluèrent et le sanctuaire, devenu trop petit, il fut décidé la construction d’un oratoire plus à l’est.
André Vauchez décrit le contexte de développement du culte de Bénigne :
« Grégoire de Tours raconte qu’en Gaule, au début du VIe siècle, l’évêque de Langres fit ouvrir un beau sarcophage antique où reposaient les restes d’un personnage inconnu envers lequel la population de Dijon manifestait une grande vénération. Le prélat décida qu’il s’agissait des reliques de saint Bénigne, martyr d’origine grecque dont on ne savait pas grand chose mais dont une Vie, rédigée quelques années plus tard, souligna opportunément qu’il avait joué un rôle important dans l’évangélisation de la Bourgogne. En dernière analyse, on a l’impression que ces « inventions » de reliques, qui furent fréquentes tout au long du Moyen Âge, ont souvent correspondu à des tentatives de la hiérarchie ecclésiastique visant à reprendre en main la dévotion populaire et à l’orienter vers des figures orthodoxes, sinon toujours authentiques. »
En 870, l’évêque de Langres Isaac décida de transformer la basilique en abbatiale et imposa la règle bénédictine aux religieux. Les travaux furent terminés en 877. En 989, l’évêque de Langres, Brunon de Roucy, fit appel à Cluny pour réformer l’abbaye et plaça à sa tête Guillaume de Volpiano, l'un des esprits les plus éclairés de son temps.
Le nouvel abbé lança les travaux de la troisième abbatiale dont la première pierre fut posée en 1001. Il fit en fait construire trois sanctuaires : une église souterraine, abri du tombeau de saint Bénigne, une église au niveau du sol pour le culte et une rotonde de trois étages au chevet des deux églises.
Ces trois constructions, terminées en 1026, couvraient une longueur de 100 m et une largeur de 25 m. L’étage inférieur de la rotonde est le seul vestige actuel de cet ensemble.
Cette abbatiale, une des plus vastes de la chrétienté, fut considérée alors comme l'un des plus beaux monuments de l'époque, sur la route de Langes à Compostelle.
En 1137, un terrible incendie ravagea Dijon et l'abbatiale subit des dégâts considérables. L'abbé Pierre de Genève décida de la reconstruire presque entièrement : seule la rotonde ayant été épargnée par les flammes, elle s'inséra dans un nouveau bâtiment de pur style roman.
Mais le 14 février 1271, le haut clocher s'effondra en entraînant dans sa chute la majeure partie de l'abbatiale. La rotonde fut une nouvelle fois miraculeusement sauvegardée. L'abbé Hugues d'Arc lança en 1281 le chantier de l'actuelle église, en style gothique. Sa construction dura plus d'un siècle. Saint-Bénigne dominait alors un immense enclos abbatial. De cet ensemble, seuls subsistent un cellier voûté d'arêtes et le splendide dortoir à trois nefs voûtées de puissantes ogives.
Le monastère prospéra jusqu'à son passage sous le régime de la commende, au début du XVI ème siècle. Les bénédictins de l'ordre de Saint Maur relevèrent le monastère au XVII ème siècle. La Révolution vida l'église de ses richesses, même si elle en épargne les murs.
En 1792, l'évêque Volfius consacra l'abbatiale comme cathédrale, mais malgré cela, en 1794, on martela les statues et le tympan du portail roman qui fut remplacé sous l'Empire par celui de l'ancienne église Saint-Étienne. Les des deux étages supérieurs de la rotonde furent détruits et le sous-sol comblé. Tout au long du XIX ème, les bâtiments monastiques disparurent pour laisser place à de nouvelles constructions. En 1874, la cathédrale fut dotée d'une flèche de 93 mètres par l'architecte Charles Suisse.
http://dijoon.free.fr/pagespeciale.htm
Ouvrage édité par la paroisse Saint-Bénigne.
La cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, la crypte
Au départ se trouvait l’ancien martyrium, une chapelle, l’église basse et la rotonde.
On arrive dans la crypte par un escalier débouchant dans l’une des absidioles en cul-de-four de l’église inférieure.
Dans le chœur de l’église basse, un hémicycle de 6 colonnes servant de déambulatoire abrite les restes du tombeau de saint Bénigne.
La base du sarcophage repose au fond d’une fosse rectangulaire encadrée de 4 colonnes rondes supportant une voûte en plein cintre.
L’énergie qui émane de ce lieu est incroyablement forte. Est-ce dû à celui qui se trouvait dans ce tombeau, ou à l’emplacement choisi, ou bien encore à l’égrégore formé par les pèlerins depuis de si nombreuses années ? Sûrement à un peu des trois.
Ce qui se passe dans la partie suivante n’est pas mal non plus : l’étage inférieur de l’ancienne rotonde. Les rotondes étaient destinées à protéger le corps d’un illustre personnage, et reprenaient l’architecture de monuments plus anciens, comme les Martyria (crypte où reposent les corps des saints) ou encore le Dôme du Rocher ou le Saint-Sépulcre (tombeau du Christ) fait au IV ème siècle à Jérusalem.
Dès lors, nous sommes en lien direct avec un symbolisme subtil. La rotonde (17 m de diamètre et flanquée de deux tours au nord et au sud), construite entre 1001 et 1003 par Guillaume Volpiano, était formée de trois niveaux, respectivement dédiés à Jean-Baptiste, à la Vierge puis à la Trinité.
Elle était divisée en 3 cercles concentriques par des colonnes : 8 colonnes délimitaient le cercle ou réduit central, 16 le premier déambulatoire voûté d'un berceau, 24 le second déambulatoire couvert de voûtes d'arêtes.
Le réduit ou lanternon ou opaïon central, dans les deux étages inférieurs, était à ciel ouvert et s'appelait le Trou Saint Bénigne. La partie supérieure était recouverte d'une coupole percée par une lunette centrale.
Deux des chapiteaux sculptés d’époque préromane représentent des orants (comme dans la crypte de l’église de Cruas). Tous n’ont pas été finis, peut-être par manque de temps, afin d’accélérer la construction des étages supérieurs.
Je sais pas vous, mais pour moi, il y a bien plus qu'un simple orant. Je trouve à ce chapiteau des airs de vulve...
Si l’ensemble avait été réalisé, les orants, répartis sur les deux rangs de colonnes se trouveraient au nombre de 24, évoquant les vieillards de l’apocalypse. On peut imaginer l’effet produit par ces 48 mains s’élevant en direction de l’ouverture du lanternon, passant par l’intermédiaire de la Vierge puis de la Trinité avant de rejoindre le ciel…
D’autres chapiteaux carolingiens présentent des entrelacs, des palmettes, des scènes animées.
Les autres chapiteaux, romans, présentent eux aussi bien des mystères.
Vers l’est s’ouvre un passage voûté d'arêtes qui pourrait être un vestige des constructions carolingiennes. Il mène à l’ancienne chapelle funéraire du VI ème siècle, située à l’origine au niveau du sol mais qui fut au fil du temps enterrée par les remblais.
Abri du sépulcre de saint Bénigne
et de tombeaux nombreux naguère rangés autour.
Ici Dijon et la chrétienté
ont vénéré dévotement
les reliques du prêtre martyr et celles de :
saint Jacques, évêque de Toul
saint Eustache, 1er abbé du monastère
sainte Paschasie, vierge dijonnaise.
Ici les hommages populaires
ont entouré pieusement
les tombes des
saints époux Hilaire et Quiète
la vierge Floride
les saints abbés Tranquille et Bertillon
les pontifes Isaac, Argrimus, Garnier 1er
évêque de Langres
une sainte portant le nom de Radegonde
la vénérable Alette, mère de saint Bernard.
Sur ce sol imprégné de la vertu des cendres
si longtemps gardées,
foulé mille ans et plus par les masses croyantes
le chrétien s'émeut, s'agenouille et prie.
La cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, église gothique, l’extérieur
L'extérieur offre un aspect sévère que l’on rattache à l’origine monastique. Cette rigueur est confortée par l’absence presque totale d’ornementation sur les façades dont les ouvertures sont le décor principal. Les contreforts massifs en succession régulière renforcent cette impression.
La façade est encadrée par deux hautes tours jumelles, agrémentées de tourelles, de plan carré à la base et de plan octogonal à la partie supérieure. Les frises séparant les niveaux de la tour sud retiennent l’attention. Au-dessus du porche, une grande baie amortie par un arc brisé éclaire la nef. Plus haut, une galerie de circulation recouverte d'un toit en appentis permet de joindre les deux tours.
Le porche rectangulaire de 3,50 m de longueur sur 9 m de largeur, avec sa gracieuse galerie ajourée appelée galerie du Gloria, est couvert d'une voûte à doubleaux, ogives et formerets, retombant sur des culots.
Le tympan actuel, refait entre 1818 et 1822, provient de l’ancienne
église Saint-Étienne. Il représente Jésus chassant les marchands du
temple et la lapidation de Saint-Étienne.
Le tympan d’origine, martelé à la Révolution, représentait la passion de saint Bénigne. Il nous reste sa tête, conservée au musée.
L'église est couverte d'un toit en charpente complètement remanié à la suite d'incendies nombreux. Sur la charpente reposaient autrefois des pierres plates ou laves, remplacées ensuite par des tuiles vernissées de couleurs différentes et disposées en losanges imbriqués.
La flèche actuelle de 93 mètres de haut, dominant la croisée du transept, date de 1896.
La cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, église gothique, l’intérieur
L’église, orientée est/ouest, possède des dimensions modestes : 68 mètres de long par 29 de large, 27,5 de haut. Elle est divisée en trois vaisseaux : une nef et deux collatéraux de hauteur différente. Les voûtes sont soutenues par des ogives, des doubleaux et des formerets.
La nef comprend 5 travées rectangulaires voûtées d'ogives, un transept non saillant, les collatéraux ont 5 travées carrées.
Son élévation est à trois niveaux.
Le triforium, étroite galerie de circulation aménagée au-dessus des grandes arcades de communication entre la nef et les bas-côtés, est constitué de baies de quatre arcs auxquels correspondent les quatre lancettes des fenêtres hautes.
Le chœur polygonal, qui ne comprend que deux travées, est construit dans une pierre ocre, différente de celle utilisée pour le reste de l'édifice. Légèrement désaxé par rapport au reste de l’édifice (mais non, les maitres d’œuvre de l’époque savaient très bien ce qu’ils faisaient), il est flanqué de deux absidioles. Les fenêtres hautes qui l'éclairent sont composées de trois lancettes surmontées d'une rose.
L’intérieur de l’église offre un aspect un peu sévère, comme l’extérieur. L’ornementation est minimaliste, les chapiteaux sont nus à l’exception de quelques-uns, datés du XIII ème siècle, décorés de feuillages aux piliers du carré du transept, de l'abside et dans les colonnettes du triforium.
Au croisillon sud du transept, le seul chapiteau présentant une sculpture animée: un pélican qui se déchire les entrailles et un phénix renaissant de ses cendres. Les deux oiseaux solaires, comme l’aigle, sont symbole d’immortalité.
Les grandes orgues sont du XVIII ème siècle.
Voir la carte ici.
La cathédrale Saint-Bénigne, les bâtiments conventuels
Le dortoir
Il longeait l’aile orientale d’un grand cloître démoli à la révolution, dont il nous reste le tympan de la porte d’entrée.
Mesurant 60 mètres par 25, il possède trois nefs voûtées d’ogives, séparées par 20 colonnes médianes.
Des fenêtres en tiers point l’éclairent.
Le tympan du cloître, du troisième quart du XIIème siècle, représente le Christ en majesté bénissant de la main droite et présentant un livre de la main gauche. Quatre anges portent une mandorle. Les symboles des évangélistes complètent la scène.
Le sous-sol
L’actuel sous-sol était un rez-de-chaussée correspondant au niveau du cloître.
L’ancien chapitre aurait occupé les trois premières petites pièces voûtées datables du XI ème siècle qui, avant compartimentage, formaient un carré de 13 mètres de côté constitué de 9 travées voûtées d'arêtes reposant sur 4 piliers.
A la suite, une salle plus vaste de 35 mètres par 13, de la même époque, est formée de 3 nefs de 6 travées, et dotée d’une cheminée, pourrait correspondre au scriptorium. Les piliers sont disposés exactement à l'aplomb des piliers romans de l'étage.
Le réfectoire
Il n’en reste que l’ancien tympan de la porte d’entrée. Daté du troisième quart du XIIIème siècle, il représente le Christ nimbé au centre, qui bénit de la main droite le pain qu’il tient dans la gauche. A sa droite, Jean a le corps ployé vers sa poitrine et à sa gauche, Pierre tient une clé aujourd’hui disparue. Judas est agenouillé devant la table et tend un poisson. Il est sculpté à une échelle réduite. Seuls 10 apôtres sont présents, les deux derniers devant être sculptés sur la première voussure.
On peut tout faire dire à des symboles, surtout ce qui arrange. Je vais vous dire ce qui m’arrange : Pierre a les clés du futur de l’enseignement du Christ, l’exotérique. On sait ce qu’il en fit avec Paul. Jean, si c’est bien lui et non une femme, possède l’initiation ésotérique. Quand à Judas, il tient le symbole de la future ère des poissons… Il est plus petit, on le remarque moins, mais il a une importance capitale.