L'abbaye de Murbach
L'origine de l'abbaye se situe en 623, où quelques moines pérégrins (c'est à dire refusant de s'enraciner longtemps quelque part : dans l'empire romain, les pérégrins sont des hommes libres, ne disposant ni de la citoyenneté romaine, ni du statut juridique des latins. Du latin peregrinor, "voyager à l'étranger" ou "être à l'étranger".
De là descendent le mot allemand "pilgern" ou l'anglais "pilgrim") bâtirent une chapelle dans les environs de Bergholtz-Zell. Le comte Eberhard d'Eguisheim, neveu de sainte Odile, frère du duc d'Alsace et puissant seigneur qui venait de perdre son unique héritier, décida de fonder une abbaye sur ses terres de la vallée de Lauch. Il fit appel à l'évêque Pirmin, lui aussi pérégrin, venant de l'abbaye de Reichenau.
Pirmin, moine de descendance wisigothe des environs de Narbonne, fut influencé par le christianisme irlandais. En 717, il dut fuir les musulmans qui envahissèrent la Septimanie. À partir de 718 il desservit l'église d'Anvers en Austrasie. Puis il fonda en 724 le monastère de Reichenau, dans l'île du même nom sur le lac de Constance, puis un grand nombre d'autres abbayes entre les Vosges et la Forêt-Noire : Gengenbach en 725, Murbach en 728, Amorbach vers 734, Wissembourg, Marmoutier, Neuweiler, Niederaltaich et Herbitzheim, vers 740, puis Hornbach en 742.
Soucieux d'organiser la vie monastique sur des bases plus stables que celles des pérégrins irlandais, il introduisit la règle de saint Benoît. Selon la chronique du moine et savant Herman, Pirmin vint à Murbach accompagné de douze moines de Reichenau. Le monastère prit forme, et sous le nom de Vivarius Peregrinorum, fut le premier d'Alsace à vivre sous la règle bénédictine. Les moines le placèrent sous le patronage de saint Léger, évêque d'Autun, martyrisé en 678 et qu'on disait proche parent du bienfaiteur.
Le 12 juillet 727, le roi franc Thierry IV accorde au monastère le privilège de l'immunité et confirme les donations d'Eberhard. Le 12 mai 728, l'évêque Widegern de Strasbourg accorde aux moines le droit d'élire librement leur abbé. L'abbaye de Murbach deviendra très vite florissante, en raison des prestigieux dons et legs dont elle bénéficia. Sa bibliothèque impressionnera les savants de l'époque.
Le 4 juillet 926, les Hongrois, cavaliers pillards descendants des Huns d'Attila, dévastèrent l'abbaye et assassinèrent sept moines, qui seront vénérés comme des martyrs en Alsace jusqu'à la révolution. L'abbaye sera alors restaurée sous la direction de l'abbaye de Cluny grâce aux dons de l'impératrice Adélaïde de Bourgogne.
Au Moyen-Age, l'abbaye de Murbach fut particulièrement riche, possédant des biens dans près de 350 localités, du Palatinat à la Suisse, et notamment la ville de Lucerne. L'abbaye fut propriétaire non seulement de terres et de châteaux-forts mais aussi d'établissements thermaux, de verreries et de mines. A partir du XIIIème siècle, l'abbé de Murbach devint même prince d'Empire. Au XVIème siècle, l’abbaye fut l’une des quatre plus importantes du Saint-Empire Romain Germanique
Les difficultés apparurent avec les saccages de la guerre de Trente ans, mais c'est surtout la révolution française qui marqua la fin de l'abbaye qui fut supprimée. Les bâtiments vides furent détruits et les matériaux réutilisés. Seuls subsistent à l'heure actuelle le chevet et le chœur de l'abbatiale.
http://fr.wikikto.eu/index.php/Abbaye_de_Murbach
http://www.alsace-passion.com/murbach/murbach_1.htm
http://www.art-roman.net/murbach/murbach1.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Murbach
L'abbaye de Murbach, de Philippe Legin, dans la collection René Roy aux éditions "La goélette".
L'abbatiale Saint-Léger
Sur la clé de voute du porche d'entrée figurent les armes du prince-abbé : le lévrier d'argent surnommé autrefois le chien de Murbach par les habitants. L'abbaye comptait parmi les plus riches et les plus influentes de l'époque, et pour être admis à Murbach, il fallait faire preuve de seize quartiers de noblesse : "orgueilleux comme un chien de Murbach" dit encore la chronique populaire.
L'abbatiale est considérée comme l'un des grands chefs-d'œuvre de l'art roman rhénan. Comme pour la Cathédrale de Strasbourg, le matériau de construction est du grès rose des Vosges. Sa construction au XIIème siècle est une superbe synthèse de ce qui se faisait dans l’Empire à cette époque. Par contre, les fouilles archéologiques de 1984 ont permis de dire qu'elle ne fut pas construite sur l'abbatiale primitive, qu'il faut chercher ailleurs.
Le bâtiment faisait environ 50 m de long et comportait une nef et deux bas-côtés détruits en 1768, afin de laisser la place à un édifice baroque qui ne verra jamais le jour.
Le chœur possède deux chapelles latérales et le transept est surmonté des deux tours à 5 étages.
Deux contreforts contrebutent la poussée des voûtes du transept depuis la démolition de la nef.
Le chevet est plat et accosté des deux chapelles qui communiquent avec le chœur par une triple arcature en plein cintre, et dont les doubles fenêtres géminées montrent qu'elles possèdent un étage.
Il y avait déjà un orgue à Murbach avant 1652, l'actuel date de 1906. Les tuyaux de sa façade furent réquisitionnés en avril 1917. En 1986, l'orgue était encore injouable.
La façade est remarquable par son élégance et sa décoration. Au-dessus des deux rangées de fenêtres à arcades, une superbe galerie aveugle à colonnettes est richement sculptée.
Cette galerie de 17 piliers différents sans aucune utilité pratique est ornée de sculptures représentant des visages, des figures géométriques et des animaux. Au centre, un temple octogonal écrasant un monstre contient une vigne, des ânes ou des chiens imitant les moines jouent de l'orgue, d'un instrument à cordes, l'un chante, l'autre balance un encensoir... Que de symboles.
Le décor du chevet n'offre aucune unité apparente, et se présente comme un ensemble de petites sculptures disséminées selon une logique adressée aux seuls initiés : Samson écartant les piliers du temple, un arbre de vie, des entrelacs, un vieillard levant une coupe à côté d'un ange (le Graal qu'il faut atteindre et que l'abbatiale nous aide à trouver ?), deux dragons enlacés se mordant la queue (représentation des énergies telluriques), une tête humaine crachant un serpent (ou l'avalant, le serpent étant symbole de connaissance).
Un abbé assis sur son trône écoute la confession d'un pénitent agenouillé. Sur le dos de ce dernier se tient un diable grimaçant lui ayant passé une corde au cou. Mais les deux personnages font un clin d'oeil... Bien. Ce n'est donc pas pour confesser une faute si grave que le personnage considéré comme un pénitent est déjà passé en enfer, mais ce personnage se libère de la corde passée à son cou par le diable symbolisant la matière, et pour se faire, il écoute l'abbé. C'est la lecture à l'envers.
Sur le tympan du portail du bras sud du transept deux lions affrontés encadrés de palmettes et de raisins surveillent l'entrée. L'un d'eux tire la langue, comme un baphomet montrant la force de la parole.
Sur le chapiteau de droite, un renard mange des raisins : la vigne symbole de connaissance initiatique.
Un homme se tient la tête entre les mains (l'intellect supporté par le manuel), un autre s'enlève une épine du pied (pour un meilleur ressenti des énergies), et plusieurs scènes de chasse à l'envers : un lièvre assomme un chasseur. Nous sommes bien dans la quête du graal, dans la conception templière du baphomet.
Les abeilles ne s'y sont pas trompées.
L’intérieur, étroit et tout en hauteur (près de 19 mètres), abrite deux monuments funéraires. Le premier est le gisant du comte Eberhard, construit au XIIIème siècle en grès peint.
Le second monument funéraire est celui de 7 moines morts lors de l’invasion des Hongrois au Xème siècle, recouvert d'une dalle baroque datant de 1706. Sur son devant, un relief pré-roman montre 4 bustes stylisés et une inscription du XIIème siècle rappelant la destination de ce tombeau.
La chapelle Notre Dame de Lorette
Cette chapelle fut construite à la fin du XVIIème siècle, en remplacement d'une antique chapelle Sainte-marie qui se trouvait près du ruisseau du Murbach et qui était délabrée. La nouvelle chapelle dont la première pierre fut posée le 30 mars 1693 fut bâtie dans l’esprit de la Contre-Réforme pour sublimer le culte de la Vierge Marie. Elle doit son originalité au fait qu’elle est une réplique de la "Casa Santa" de Loreto en Italie.
Les chapelles Notre-Dame de Lorette sont des répliques de la "casa santa", la maison de la Vierge de Loreto en Italie. Cette maison où elle naquit, où elle vécut et reçut l'annonciation fut transportée, selon la légende par les anges, de Nazareth jusqu'à Loreto.
L'histoire véritable est plus simple : lorsque les croisés furent expulsés de Palestine en 1291, un prince byzantin, Nicéphore I Doukas Commène, prit en 1290 l'initiative de transférer une maison typique de Palestine depuis Nazareth jusque dans les Marches italiennes. La maison fut démontée à Nazareth en 1291, débarquée ensuite sur les côtes de Dalmatie et finalement réassemblée à Loreto en 1294.
Ces chapelles, généralement édifiées du temps de la contre-réforme entre 1650 et 1750 environ, répondent à une règle architecturale bien précise en respectant les dimensions de la casa santa, l'esprit de son décor et son aménagement intérieur. Elles se trouvent généralement situées sur une hauteur en dehors de la localité.
Ainsi la chapelle de Murbach, comme ses consœurs, comporte deux sanctuaires, qui communiquent par la fenêtre de l’ange. Les deux pièces possèdent chacune un autel. La première est voûtée d'arêtes, la deuxième est couverte d'une voûte en berceau.
Il n’y a pas de fenêtre dans la maison de la Vierge. Une cloison en bois dissimule la sacristie avec sa cheminée, le "sacro camino" qui symbolise la cuisine de la Vierge au-dessus duquel se trouvent, dans une niche, la statue de la Vierge et de l’Enfant, couronnés.
En 1714 le capucin Constantin Mettler fait installer sur le mur arrière de la chapelle un cadran solaire.
La restauration entreprise en 1998 a voulu redonner à la chapelle un décor conforme à l’inspiration baroque d’origine, transposant dans la région l’esprit du sanctuaire italien. Dans la chapelle principale a été restitué le décor en fausses briques, qui existait jusqu'à la restauration de 1946 et qui est conforme à la tradition des Lorette. Les deux murs latéraux sont décorés de grandes peintures murales avec des scènes d’expression figurative, évoquant la vie de la Vierge Marie et de l’enfant Jésus.
Le curé Jean-Thébaut Mellecker, restaurateur de l'abbaye de Murbach fit installer un chemin de croix sur le sentier qui mène à la chapelle Notre Dame de Lorette. Le chemin de croix, proposant aux fidèles un chemin spirituel entre l'église et la chapelle est béni en septembre 1873.
La première station représente le mont des Oliviers avec le Christ en prière devant un ange portant un calice. A côté, une statue néo-médiévale de saint Pirmin, sculptée en 1864. Puis les stations sont de simples croix portant des citations des évangiles. La douzième station représente une grande croix adossée au mur de la chapelle près du cadran solaire. Au pied de la croix se trouve Marie Madeleine.
La quatorzième station représente la sépulture du Christ reposant dans une grotte appuyée à la montagne.
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Murbach