L’ile de Hoy
L’ile la plus grande des Orcades après Mainland, se situe au sud de l’archipel. Son nom provient du vieux norrois Hàey, qui veut dire l’ile haute.
En effet, c’est sur Hoy que se tient le point le plus élevé des Orcades, Ward Hill, séparée de sa sœur Cuilags par la vallée de Rackwick. Ces deux petites montagnes sont celles que nous voyons de Brodgar et Steness, entre lesquelles va se coucher le soleil.
Dans la mythologie scandinave, c’est sur Hoy que se déroule la bataille sans fin entre Hedin et Högni, respectivement époux et père de Hildr, une valkyrie ayant le pouvoir de ressusciter les soldats morts.
Le ferry nous emmène de Mainland et de la baie de Houton, où nous n’avons eu aucun problème, au petit port de Lyness.
Une route longeant la jolie petite baie de Lyrawa,
les petits lacs de la lande à tourbière à côtés desquels poussent les linaigrettes à feuilles étroites, cotton grass en orcadien, autrement dit l’Eriophorum angustifolium,
passe devant la Dwarfie stane…
avant d’arriver dans la baie de Rackwick,
départ du sentier qui monte au Old Man of Hoy, petit bout des falaises les plus hautes du Royaume-Uni.
Dwarfie Stane
Dans la vallée glaciaire encaissée menant à la baie de Rackwick se tient l’un des mégalithes les plus connus des Orcades, Dwarfie Stane.
On y accède par un chemin en lattes de bois aménagé au-dessus d’une tourbière.
Ce bloc erratique de grès rouge fut déposé là par les glaciers, comme son voisin Partick Stane, situé un peu plus haut.
Le fait remarquable, c’est que cette énorme pierre fut évidée de main d’homme, en deux petites cellules séparées par un couloir. Le plan ressemble à certains cairns des Orcades.
La pierre mesure 8,6 m de long, 4m de large et jusqu’à 2,5 m de haut. L’entrée est un carré d’1m, ouvert vers l’ouest, vers le soleil couchant. Le passage desservant les deux cellules arrondies, de 1,70m de long par 1m de large, mesure 2,2m de long. La hauteur du tout est de 1m.
Chaque ouverture de cellule présente une bordure formant une ouverture carrée. La cellule de droite possède un rebord de pierre ou «oreiller» à son extrémité orientale.
Devant l’entrée se trouve la pierre qui fermait le passage. Elle était encore en place au XVIe siècle.
Dwarfie Stane fut pillée en forçant l’entrée par un trou dans le toit. Ce trou, mentionné au XVIe siècle, n’a été réparé (avec du béton) que dans les années 60.
La pierre n’a pas échappé à la mode des graffitis. Le capitaine William Mounsey y a gravé son nom en latin et à l’envers en 1850, ainsi qu’une phrase en persan : « I have sat two nights and so learnt patience : je me suis assis deux nuits et ainsi appris la patience ».
Les archéologues, qui ont daté la première utilisation de la pierre de 3 000 ans avant notre ère, pensent d’après la ressemblance avec les cairns des Orcades, qu’elle fut utilisée comme tombeau. Marrant quand même le nombre hallucinant de mégalithes ayant servi de tombe, presque autant que d’objets inconnus ayant servi au culte. D’autres explications parlent d’un ermitage chrétien, théorie basée sur le fait que les visiteurs laissaient derrière eux des offrandes. Mais en général, sur les terres du nord, les offrandes se font surtout aux esprits de la nature… Il semble quand même probable que la pierre fut utilisée par les habitants du village néolithique découvert à Whaness Burn, situé à 1,6 km plus au nord.
Nous sommes en présence ici de la pierre du nain (dwarf, le nain en anglais). Ce nom fut donné en raison de la petitesse de la taille des cellules ou du fait que ce sont des nains qui ont taillé la pierre. Paradoxalement, les légendes parlent aussi de géants. Selon une ancienne fable folklorique orcadienne du XVIe siècle, écrite par Jo Ben, c’est ici que vécurent le géant Trollid et sa femme. Un troisième géant, voulant se rendre maitre de Hoy, les enferma à l’intérieur. Mais Trollid cassa la pierre avec son marteau, et ils purent sortir. Cette histoire a au moins le mérite d’expliquer le trou dans le toit.
Une autre légende, écrite en 1700 par le docteur Wallace, parle d’une mystérieuse escarboucle ou d’un œuf de pierre cachés dans une grotte des falaises (Dwarfie Hammars) surplombant le mégalithe.
Sir Walter Scott parle de la pierre dans son roman de 1821, The Pirate. Il écrit qu’elle fut la résidence du nain Trollid :
« Put for my misfortune, I was chiefly fond to linger about the Dwarfie Stone, as it is called, a relic of antiquity, which strangers look on with curiosity, and the natives with awe. It is a huge fragment of rock, which lies in a broken and rude valley, full of stones and precipices, in the recesses of the Ward-hill of Hoy. The inside of rock has two couches, hewn by no earthly hand, and having a small passage between them. The doorway is now open to the weather; but beside it lies a large stone, which, adapted to grooves still visible in the entrance, once had served to open and to close this extraordinary dwelling, which Trollid, a dwarf famous in the northern Sagas, is said to have framed for his own favourite residence. The lonely shepherd avoids the place; for at sunrise, high noon, or sunset, the misshapen for over the necromantic owner may sometimes still be seen sitting by the Dwarfie Stone ».
« Pour mon malheur, j’aime à m’attarder sur la Dwarfie Stane, comme elle est appelée, un vestige de l’antiquité que regardent avec curiosité les étrangers et avec crainte les indigènes. C’est un énorme fragment de roche, qui se trouve dans une rude vallée encaissée, pleine de rochers et de précipices, dans un recoin de la colline de Ward sur Hoy. L’intérieur de la pierre possède deux chambres, creusées par des mains non humaines, reliées par un petit passage. L’entrée est maintenant ouverte aux quatre vents, mais sur le côté se trouve une grosse pierre qui, adaptée aux rainures encore visibles à l’entrée, servit autrefois à ouvrir et fermer cette demeure extraordinaire que Trollid, le nain célèbre des sagas nordiques, était sensé avoir pris pour sa résidence favorite. Le berger solitaire évite l’endroit ; au lever du soleil, à midi plein ou au coucher du soleil, le propriétaire, difforme pour plus de nécromancie, peut parfois être vu assis sur Dwarfie Stane ».
Que penser de toutes ces légendes ? Mon aphorisme préféré reste « il n’y a pas de fumée sans feu ». Les nains, comme les géants (au départ il n’est pas question de leur taille, et ils sont décrits comme alternativement grands ou petits), sont, dans la mythologie scandinave, liés à la mort, étant issus des vers trouvés sur le cadavre du géant primordial Ymir. Ils sont devenus ensuite des membres du petit peuple vivant sous terre, dans les pierres ou dans les tertres. Plus tard, le nain sera considéré comme un aspect primitif de la conscience. Que se passe-t-il près de Dwarfie Stane ?
Pour élargir sa conscience, il faut commencer par élargir ses sens. Premier passage dans les chambres, pour la vision, l’ouïe, le toucher, et les autres (il n’y en a pas que 5). En sortant, si tout s’est bien passé, on prend un peu d’eau dans la cupule, puis on « sent » une autre pierre posée plus haut.
Là, debout, cheveux aux vents, regard tourné vers le ciel et pieds posés par terre, la conscience s’élargit et le corps s’oublie. Y’en a même qui disent qu’ils l’ont vu voler…
On verra ensuite d’autres pierres, avec différentes fonctions. L’une d’entre elles vous redynamisera, l’autre vous fera oublier vos soucis mesdames, une autre encore vos problèmes messieurs.
http://www.orkneyjar.com/history/tombs/dwarfiestane/
https://en.wikipedia.org/wiki/Dwarfie_Stane
http://www.odysseyadventures.ca/articles/orkney-tombs/rousay_cairns.htm