L’église Saint-Jean-Baptiste de Crupies
Etablie
sur un site gallo-romain au-dessus du cours du Roubion, elle apparaît
dans les textes en 1107, mais son origine est bien plus ancienne
(peut-être était-ce une église baptismale), comme le prouvent les
fragments remployés au-dessus de la porte.
Y
sont sculptés en méplat des rameaux de vigne, aux feuilles très
découpées, que picore un oiseau, travail préroman, voire
pré-carolingien. Église dépendant du prieuré de Bourdeaux, lui-même
dépendant de l'abbaye bénédictine de Savigny, près de l'Arbresle
(Rhône), l'édifice était en ruines après les guerres de religion.
Remplaçant aux XVIle et XVIlle siècles l'église Sainte-Catherine du
village perché de la Vialle, il fut transformé en temple protestant de
1806 à 1904, désaffecté, puis restauré en 1960.
La
nef unique comprend deux travées, dont les murs sont renforcés d'arcs
de décharge en plein-cintre. Les impostes qui reçoivent ces derniers
sont formées de deux cavets superposés ou d'un cavet surmonté d'un
tore, moulures peu fréquentes dans le voisinage. A l'époque classique,
on a fait disparaître un dosseret aux pilastres, rebâti la voûte et la
façade, ouvert de grandes fenêtres.
Le
petit appareil en moellons de grès roux des murs gouttereaux de la nef
contraste avec les assises plus minces, où se mêlent des moellons
calcaires romains, de la partie orientale de l'édifice : le raccord se
voit bien dehors à la seconde travée, au sud.
L'église était en travaux quand je suis venue dans le pays.
Le
contraste apparaît tout aussi net à l'intérieur, quand on arrive à la
travée de chœur, vaste et insolite, dépourvue d'arcs de décharge.Deux
hauts pilastres, disposés légèrement en oblique pour bien correspondre
aux contreforts et portant des tailles décoratives, marquent l'entrée
de la travée. Comme ceux de l'abside, ils sont surmontés d'une imposte
que décore, seul luxe de l'édifice, une frise de deux ou trois
spirales, auxquelles peut s'en ajouter une demie. Le motif, dérivé du
rinceau, se rencontre à l'époque carolingienne et deux des frises
conservent, entre des spirales, le souvenir déformé d'une petite
feuille dont la signification n'était plus perçue. Dans l'hémicycle de
l'abside, frappante elle aussi par sa nudité, se remarque une assise de
moellons complétés par des briques. Au sud s'ouvre dans la travée une
porte ancienne, contiguë à l'un des contreforts très massifs,
construits en partie avec le même appareil que l'édifice, ce qui prouve
que celui-ci était voûté dès le début.
Travée
et abside paraissent contemporaines, ou peu s'en faut, de
l'installation des moines de Savigny dans plusieurs églises autour de
Comps, et en particulier à Bourdeaux, à partir de 1031. La simplicité
des structures, le dégagement des volumes dû à la nudité des parois,
l'emploi du petit appareil, l'archïsme de la décoration ne démentent
pas cette datation ; le motif des spirales se retrouve en remploi à
Comps. Quant à la nef, avec sa modénature, elle paraît remonter au Xlle
siècle.
http://www.centcols.org/les_rendez-vous/damian/monuments_romans.htm