Placée sous le vocable de Saint-Hilaire (Hilaire, évêque de Poitiers et théologien au IVème siècle, fut élevé au rang de docteur de l'Eglise en 1851), la collégiale est l’une des dernières constructions romanes du Brionnais.
L’extérieur
Le chevet est la partie la plus ancienne, datant des années 1080-1090. Il se compose d’une abside et de deux absidioles.
Les bras du transept, légèrement saillants, furent construits dans les années 1110/1115. Ils sont percés sur leur façade d'un oculus surmonté d'une double arcature.
Le clocher octogonal à deux étages surmonte la croisée du transept. A l'étage inférieur, les baies géminées sont aveugles.

A l'étage supérieur, les baies sont ouvertes et sont composées d’une archivolte en cintre brisé retombant sur de fines colonnettes à chapiteaux, de part et d'autre d'une baie géminée en plein cintre.
Les collatéraux sud et nord sont ouverts par deux petits portails. Celui du sud possède un tympan orné d'une simple croix potencée. Il fut probablement récupéré sur l'ancienne église et doit dater du dernier tiers du Xle siècle. Celui du nord, encadré de voussures et pilastres, est surmonté d’un linteau orné de rosaces et d'un tympan sculpté de trois fleurons.
Les collatéraux présentent de curieux modillons. Parmi eux, n’en doutons pas, une représentation du féminin dans toute sa splendeur, rappelant certaines Sheela Na Gig. Une chouette, côté nord, nous montre la voie de la sagesse.

La façade ouest, terminée vers 1180, possède un portail très décoré, assez lourd de facture, signe du déclin de la sculpture romane du Brionnais à la fin du XIIe siècle.
Le portail est surmonté par une archivolte dont les trois voussures en retrait retombent sur les colonnettes et les pilastres latéraux.


Le linteau représente un épisode de la vie de saint Hilaire pendant le concile de Séleucie en 359. L’empereur Constance avait convoqué deux conciles, un à Rimini pour l’église d’occident, un autre à Séleucie pour l’église d’orient. Hilaire, alors exilé en Phrygie, y défendit la foi de Nicée contre les Ariens. Il est représenté au centre, assis par terre, entre les évêques. Un ange le protège et lui tend quelque chose. A gauche, peut-être la représentation d’Hilaire debout en haut d’une abbaye, au paradis, alors qu’à droite on voit un personnage en bas, assis en enfer. Des démons emportent son âme sous la forme d’un enfant sortant de sa bouche. Il s’agit d’un défenseur de l’Arianisme, peut-être Acace de Césarée, qui déposa un Credo proposant l'homéisme, ou bien Léoas, commissaire de l’empereur Constance.
Le tympan représente le Christ en majesté dans une mandorle soutenue par deux anges. De chaque côté, les symboles des 4 évangélistes. La sculpture est sans grâce, la tête du Christ qui n’a rien de roman fut rajoutée au XIXe siècle lors de la rénovation.
Plus intéressants sont les corbeaux de chaque côté du portail. Côté nord, un personnage accroupi, vêtu d’un seul pagne, pose ses deux mains sur les genoux. En face de lui, côté sud, son jumeau lève les bras et soutient le ciel de ses mains retournées.

Le seul chapiteau historié, côté sud, nous présente deux personnages énigmatiques. Regardant le nord, une femme aux grandes oreilles (elle entend) et portant ceinture (lien avec Cluny) lève une main au ciel pour les énergies cosmiques, l’autre étant tournée vers la terre et les énergies telluriques. Ceci est confirmé par la présence de d’un serpent et d’un crocodile s’abreuvant à ses seins. C’est la mère nourricière.
Regardant à l’ouest, au couchant, un homme également aux grandes oreilles et lui aussi ceinturé, portant la barbe en signe de connaissance et de sagesse, montre entre ses cuisses le symbole de la virilité.
L'intérieur
L’église se compose d’une nef à quatre travées flanquée de deux bas-côtés, d’un transept, d’une travée de chœur et d’une abside en hémicycle entourée de deux absidioles.
Au-dessus du portail occidental se trouve une tribune en encorbellement, reproduction en miniature de celle de la grande abbatiale de Cluny III.
La nef, achevée vers 1125/1130, d’influence clunisienne, communique avec les deux bas-côtés par de grandes arcades en cintre brisé. Les trois premières travées sont couvertes d'une voûte en plein cintre surbaissée, refaite au XIXème siècle.

Entre le niveau des grandes arcades et celui des fenêtres hautes s'ouvre un triforium à six arcatures sur colonnettes qui forme une galerie décorative, sans aucune fonction de circulation.
Les piliers cruciformes sont cantonnés, du côté de la nef, de pilastres cannelés. Les chapiteaux ne sont pas enseignants et se contentent de motifs feuillus. Seuls quelques figures sortent des feuillages, et un aigle aux ailes déployées nous montre la limite entre l’église basse et l’église haute, prêt à prendre son envol.
La croisée du transept est surmontée d’une coupole-lanterne octogonale reposant sur des trompes et décorée d’arcatures.

L’entrée de la travée de chœur est gardée par deux sculptures sur culots. Des diables ? Pourquoi ? Parce que l’un est cornu ? Mais alors où est sa queue fourchue ? Regardez bien. Celui du sud, côté solaire, porte le ciel d’une seule main. Il semblerait qu’il soit en position d’évacuer la matière lourde avant de passer dans le saint des saints.
Celui du nord, côté lunaire, porte des cornes, celles du croissant de lune. Mais en regardant mieux, j’ai vu apparaître la figure du Baphomet. En effet, le personnage porte une tonsure, des cornes, il tire la langue, ses oreilles sont démesurées, ses yeux grands ouverts. Il ne manque que les ailes pour représenter le symbole de la sagesse et de la connaissance, image synthétique de la science et de la tradition.