L’église Sainte-Croix de Champeix
Champeix est une jolie petite ville sur les bords de la Couze Chambon. Son nom vient du latin "Campellis", qui signifie "petit champ". L’endroit fut habité depuis fort longtemps, en témoigne la pierre levée néolithique, le menhir de Pierre-fiche sur la commune de Ludesse à quelques kilomètres.
A partir de 1225, la seigneurie et le château du Marchidial, possédant son église Saint-Jean et son presbytère, devinrent l’une des résidences des dauphins d’Auvergne. Le village, où se tenaient d’importantes foires et marchés, se dota d’une enceinte.
Au XVIe siècle, après être passée aux mains des Bourbons, la seigneurie est vendue à un habitant d’Issoire, Thomas Boyer, seigneur de Saint-Cirgues. A noter qu’au XVIIIe siècle, elle sera entre les mains de deux femmes remarquables : la marquise de Rupelmonde, égérie de Voltaire, et Madame de Tourzel, gouvernante des enfants de Louis XVI.
L’église paroissiale Sainte-Croix fut construite au XIIe siècle sur la rive droite de la Couze Chambon, sur l’emplacement d’un ancien couvent de moines Camaldules. L'ordre Camaldule est un ordre religieux fondé par Romuald de Ravenne (saint Romuald) en 1012 à Camaldoli en Toscane, sous la règle de saint Benoît. Les moines camaldules allient la vie commune de travail et de l'office bénédictin à l'érémitisme. Ils portent l'habit blanc et la barbe pleine.
L’édifice comprend une nef voûtée en plein cintre de quatre travées. Seule l’abside semi-circulaire couverte d’un cul de four reste romane.
Les bas-côtés voûtés d’ogives furent rajoutés au XVe siècle.
Le portail la façade nord du transept fut refait au XVIIIe, conservant un ancien linteau roman pentagonal réunissant les symboles de la trinité : la main de Dieu (père), l’agneau (fils) et la colombe (esprit-saint). Il conserve l’inscription « Tres trinum signant, Pollex, Peccus, atque Colomba »
Le clocher, construit en 1890, a remplacé celui d’origine, probablement démoli lors de la révolution.
Rien de tout ça n’est très original. Mais l’église de Champeix possède quelque-chose de très particulier qui n’est que rarement compris.
Au départ d’une construction de sanctuaire, le maitre d’œuvre trace un cercle (symbole du ciel) à partir d’un point central (symbole du créateur), point de réunion des différentes énergies. Il place son gnomon, ou bâton, au centre du cercle. Puis il marque sur le cercle l’ombre de son bâton, au lever et au coucher du soleil aux solstices d’hiver et d’été, ce qui lui donne le quadrilatère solsticial (variant en fonction de la latitude du lieu).
C’est par rapport au cardo et au décumanus que se calcule la position des « colonnes du temple », que l’on retrouvera bien visibles dans les sanctuaires romans d’Auvergne, comme à Notre-Dame-du-Port de Clermont-Ferrand, ou à Volvic par exemple. La première colonne, au sud, fonctionne avec le soleil et agit avec la matière, le conscient, le masculin. La deuxième, au nord, reçoit les énergies de la lune et anime la psyché, le subtil, le féminin. Portes symboliques, elles marquent l’entrée dans le véritable sanctuaire, la limite entre les parties tellurique et cosmique, entre le profane et le sacré.
A Champeix, ces colonnes, qui n’ont aucune utilité autre que symbolique (elles ne supportent aucun arc, aucune voûte), sont présentes. Cerise sur le gâteau, leur nom est gravé dessus. Je vous présente Jakin (Jachin) et Boaz (Boot), qui délimitent l’entrée du chœur.