L’église Saint-Saturnin
Décidément, ce voyage fut fait sous l’égide de Saturnin/Sernin. Après Saint-Hilaire et son sarcophage lui étant dédié, après Toulouse, après Pont-Saint-Esprit qui s’appelait avant Saint-Saturnin-du-Port, voici le village de Saint-Saturnin en Auvergne.
Le village fut la résidence des barons de la Tour d'Auvergne, qui devinrent Comtes d'Auvergne. De cette famille est issue Catherine de Médicis, fille de Laurent II de Médicis et de Madeleine de la Tour d'Auvergne. Le village est enraciné sur une coulée de lave provenant de l’éruption volcanique des Puys de la Vache et de Lassolas.
Perché sur cet éperon, l’édifice roman fut l’église d’un prieuré bénédictin fondé en 1040 qui dépendait de l’abbaye Saint-Austremoine d’Issoire. Quelques vestiges du cloître primitif sont accolés au sud de l’église.
L’église, construite au XIIème siècle (on sait qu’elle fut terminée en 1157) est la plus petite des 5 églises romanes majeures d’Auvergne. Elle s’en distingue par l’absence de chapelles rayonnantes autour du chevet. La forme pyramidale de l’ensemble mène le regard vers le ciel par l’intermédiaire du massif barlong et du clocher octogonal.
Lors de la révolution, sous la terreur, l’église fut rachetée par monsieur Verdier de Pagnat, afin qu’elle soit soustraite à la profanation. Le clocher, épargné, servit de modèle à ceux de Saint-Austremoine d’Issoire et Notre-Dame du Port de Clermont, reconstruits au XIXème siècle.
On dit que l'église fut dédiée à saint Saturnin, premier évêque de Toulouse martyr au
IIIème siècle, dont les reliques parvinrent en Auvergne au VIème
siècle, ainsi que le rapporte Grégoire de Tours. Mais...
Le père Travers, l'ancien curé de Saint-Saturnin, pense qu'il s'agissait de celui qu'on appelait "le saint masqué", représenté au modillon sud de l'église sous la forme d'un Janus à 2 visages, celui qui regarde l'avenir étant masqué. Dans années 1920, on chantait encore dans les écoles religieuses une chanson qui parlait du saint masqué et dont une partie du refrain disait :" Nous irons tous à Shamballa"... Histoire confirmée quelques années plus tard par une octogénaire élevée chez les bonnes soeurs.
Saint Saturnin serait donc la représentation du dieu Saturne. L'église est calée sur le concept Saturne-Lune et sur le rapport 1/3 2/3 au niveau des proportions.
Pour voir la carte, cliquez ici
http://saint.saturnin.free.fr/prome/decouverte.html
http://www.art-roman.net/stsaturnin/stsaturnin.htm
http://pagesperso-orange.fr/marc.champommier/st-sat0.html
http://homepage.mac.com/joel.jalladeau/dome/6/6.html
L’église Saint-Saturnin, l’extérieur
C’est sur le chevet, le massif barlong, les transepts et les murs latéraux que se concentrent les décors : arcatures, frises en damiers, modillons à copeaux, cordon à billette et grande rosace.
Elles utilisent l’alternance des deux pierres très répandues dans la région, l’arkose blonde de Montpeyroux avec des incrustations décoratives de lave noire de Volvic.
Le chevet possède de puissantes assises : le premier demi-cercle correspond au déambulatoire, le deuxième à l’abside. Les arcades sont groupées par 3. Sur le long rectangle du transept s’élève le massif barlong (posé perpendiculairement par rapport à l’axe du bâtiment), propre aux églises romanes d’Auvergne.
Le tout est couronné d’un clocher octogonal de deux étages à baies jumelées creusées dans l'épaisseur du mur et d’une flèche flèche de pierre à huit pans.
La façade occidentale est constituée d'un simple mur pignon, renforcé par deux contreforts. Trop exposée aux intempéries, cette façade ne comporte aucune ornementation.
L’église Saint-Saturnin, l’intérieur
Le plan est traditionnel : trois nefs de quatre travées, transept et chevet à déambulatoire ou galerie de circulation qui entoure l’hémicycle de six colonnes. L’intérieur très clair est remarquable par l’harmonie des proportions et par l’intérêt architectural et symbolique.
La nef voûtée en berceau sans doubleaux est flanquée de deux bas-côtés voûtés d'arêtes avec doubleaux surmontés d’une tribune. L'éclairage vient des fenêtres des murs gouttereaux des bas-côtés.
Les chapiteaux sculptés dans une pierre volcanique grise sont d’une grande sobriété, décorés de feuillages, à l’exception de quatre d’entre eux, au nord, qui comportent également des personnages et des animaux.
Un aigle aux ailes déployées, deux oiseaux buvant dans une même coupe,
et la représentation d’une tête d’homme placé en haut d'une tige végétale. Deux oiseaux semblent lui parler à l’oreille. De sa bouchent sortent des feuillages.
A la croisée des transepts, 4 piliers au sol formant un plan carré (la terre), qui se transforme en hauteur, en passant par l’octogone, en cercle (le ciel). Les piliers sont carrés avec trois colonnes engagées : 4, la terre, 3, le ciel.
Le chœur comporte un déambulatoire, mais aucune chapelle rayonnante. Les trois marches montant au chœur sont percées d’orifices donnant sur la crypte et représentant l’alpha et l’oméga.
Une peinture murale, dans la deuxième travée nord du bas-côté, du début du XVIème siècle, représente l’annonciation, et ce qui est plus rare, la résurrection de Lazare.
Cette travée a probablement été utilisée comme chapelle funéraire et une cheminée d’aération des caveaux se voit contre le deuxième pilier de la nef.
Récemment, une vierge romane en majesté, découverte dans le village, fut offerte à l'église par son propriétaire.
Elle possède tous les attributs d'une vierge noire, même si elle n'est pas répertoriée comme telle.
L’église Saint-Saturnin, la crypte
On y accède par deux escaliers latéraux. Son plan reproduit celui en fer à cheval du chœur.
Quatre colonnes supplémentaires, au centre de l'hémicycle, supportent le pavé du sanctuaire.
Entièrement voûtée d’arêtes, elle est d’une grande sobriété.
Trois fenêtres assurent un éclairage discret. Les colonnes n'ont pas de chapiteaux ni de bases.
Elle arbitre un très beau groupe en pierre, une pietà en calcaire polychrome du XVème siècle. La Vierge est entourée de saint Jean et sainte Madeleine.
La chapelle Sainte-Madeleine
Cette petite chapelle dédiée à sainte Madeleine est un peu antérieure à l’église, peut-être du XIème siècle. Orientée au nord est, c’est le plus ancien monument de Saint-Saturnin.
On ne connaît rien de ses origines et de sa fonction initiale. Elle pourrait avoir été la première église paroissiale du village ou la chapelle du prieuré bénédictin de 1040. Elle a servi aux baptêmes et au dépôt des morts aux XVII et XVIIIème siècles.
Intégrée au système défensif du village lors de la guerre de Cent ans, elle fut surmontée d’une tour semi-circulaire qui avait son répondant de l’autre côté de la place.
Transformée en habitation, puis en école en 1844, la chapelle fut acquise par la commune et restaurée dans le courant du XXème siècle en vue de l’utiliser comme salle d’exposition.
Sur le linteau de la porte jouxtant la chapelle est inscrit : « nous avons este comme vous un jour vous seres comme nous, penses y bien – 1668 ».
C’est l’entrée de l’ancien cimetière, transformé en un jardin accroché au roc, dominant les gorges de la Monne et l’une des sources alimentant le village.