Saint-Donat-sur-l’Herbasse, le cloître
Le cloître fut construit vers la fin du XIIe siècle sur l’ancienne place d’armes du château. Il n’en reste que la galerie occidentale, après les diverses destructions des hommes et du temps. Elle fut démurée durant la restauration de 1964.
Les galeries couvertes d’une charpente étaient ouvertes sur un jardin au milieu duquel se tenait un puits. Le puits, toujours opérationnel, n’est pas au centre même du quadrilatère, mais posé au-dessus d’une rivière souterraine qui se prolonge sous la nef de l’église.
Le cloître comptait 26 arcades et 52 colonnes sculptées.
Sur les 4 piles d’angle étaient sculptés les bas-reliefs des évangélistes, à rapprocher de la statuaire viennoise du XIIe siècle.
A côté d’eux, la représentation de musiciens. On reconnaît des joueurs de vièle (certains y ont vu un rebec, mais cet instrument n’existait pas au XIIe siècle et n’est jamais représenté sur les sculptures romanes, mis à part celles des restaurations sous Viollet-Leduc).
Chaque arcade était couronnée d’une frise de feuillage, dans laquelle s’incrustait parfois la représentation d’animaux. Ici, peut-être un poisson genre saumon (la connaissance) et un oiseau. Il est très difficile d’interpréter la symbolique des sculptures, l’ensemble taillé dans la molasse a très mal résisté au temps.
Entre les arcades, dans un cercle, il semblerait que l’on trouve la représentation de métiers de l’époque, comme un forgeron avec marteau et tenailles, ou un bûcheron ou un paysan fauchant le blé. Comme dans la sculpture romane rien n’est laissé au hasard, le rapport avec la transformation de la matière brute ne vous aura pas échappé.
Plus curieux sont les deux cercles, symbolisant le cycle éternel de la vie, mais aussi notre champ d’expérience. L’un contient un homme nu tenant dans ses mains deux serpents dont les têtes semblent sortir de sa bouche et dont les corps se rejoignent au niveau de son sexe. Comme les deux serpents d’Hermès s’enroulant autour du caducée, sont-ils la représentation des deux forces, cosmiques et telluriques, que l’homme doit maitriser afin de continuer son évolution ? Sont-ils la représentation de la Kundalini s’éveillant ?
L’autre cercle est tellement abimé qu’il est pratiquement impossible de le lire. Un homme nu (on ne peut pas dire le contraire) dont les jambes se terminent en nageoires (présence de l’élément eau) tient de ses deux mains peut-être des serpents dont les têtes se retrouvent de chaque côté de son visage. Là encore, l’homme maitrise un élément par la sagesse que lui souffle le serpent.
Quand on parle du serpent, le voilà en tentateur (ou initiateur) sur le pilier d’Adam et Eve. Il s’enlace autour de l’arbre de Vie, montrant à Eve le fruit de la connaissance qu’elle attrape de sa main. Eve commence à retourner ses jambes vers le ciel.
Bizarrement, Adam possède des pieds de bouc bien posés sur le sol. De son côté, l’arbre n’a pas encore de fruits. Serait-il encore trop ancré dans sa bestialité, hésitant à prendre le chemin spirituel de son évolution ?
Sur le pilier central, une tête de loup sort des feuillages. Il est au lunaire ce que le lion est au solaire, le feuillage représentant la promesse du fruit. Le début du chemin est souvent marqué par ce loup, que l’on appelle le Loup Vert, entendez l’Ouvert.
Côté est, les chapiteaux furent refaits récemment par un sculpteur contemporain, soi-disant à l’identique.
Vu l’état de délabrement des sculptures d’origine, il me semble inapproprié de vouloir les interpréter, ce qui n’enlève rien au remarquable travail de l’artiste.
Les griffons ailés à queue de serpent restent tout de même assez simples à analyser.