La symbolique du centaure
Le centaure (et son symbolisme dans l’art roman en particulier, où il est le plus souvent la représentation de Chiron le sage) est issu de la mythologie grecque.
Deux sortes de centaures nous sont connues, l’une issue de l’union d’Ixion et d’une nuée qu’avait créée Zeus pour remplacer sa femme Héra, convoitée par Ixion, et celle de Chiron, issu de Cronos et de l'Océanide Philyra.
Nous ne parlerons pas de la première, habitant la Thessalie et l’Arcadie. Ces centaures, voisins des Lapithes qui les vainquirent et les chassèrent de la région, représentent la force brute animale. Nous parlerons de la deuxième, du centaure (sans tort, 100 or) Chiron.
Chiron, dont l’étymologie ramène au grec ancien Kheiro, qui veut dire main (demi-frère des 10 Dactyles, les doigts, eux aussi issus de Cronos, qui enseignèrent, coiffés de couronnes de chêne, les mystères à Orphée ainsi que l'usage du fer) représente quand à lui la sagesse et la science. Educateur de nombreux héros, Zeus lui offrit l’immortalité pour services rendus.
Il doit son apparence d’homme-cheval au fait que son père Cronos, marié à Rhéa, voulut s’unir à Philira. Surpris par sa femme, il s’enfuit sous la forme d’un cheval. Philira donna alors naissance à Chiron. Il fut alors éduqué par Artémis et Apollon, qui lui enseignèrent la chasse, la médecine, la musique et la divination. Il connaissait l’art de guérir par les plantes et l’art de la chasse.
Chiron eut de nombreux disciples. Parmi les plus nombreux, nous pouvons citer les Dioscures (les jumeaux Castor et Pollux, fils de Léda, que Zeus séduisit sous forme d'un cygne), Enée (fils d’Aphrodite et d’Anchise qui fut frappé par la foudre de Zeus et resta boiteux), Palamède (inventeur du jeu de l’oie), Héraclès (tuant les serpents enfant), Aristée et son fils Actéon (aimé d’Artémis), Asclépios (fils d’Apollon, grand médecin à l’origine du Caducée), Jason (dit le guérisseur, conquérant de la Toison d’Or, époux de la magicienne Médée), Ulysse, Patrocle et Achille, fils de Pélée, lui-même fils de la nymphe Endéis, fille de Chiron. Achille est donc l’arrière petit fils de Chiron.
Tout cela est souvent en rapport avec l’oie et les serpents, la magie, les boiteux, la foudre… Et les Argonautes (souvent cités par les alchimistes), navigant sur l’Argo, le bateau qui parle, l’art goth, l’argot, l’art gothique interprétable par le langage des oiseaux, à la recherche de la toison d’Or, la pierre philosophale. Nous sommes bien là dans une quête spirituelle.
La mort de Chiron est aussi très symbolique. Il fut atteint par l’une des flèches d’Héraclès, empoisonnée par le sang de l'Hydre de Lerne. Où ? Au genou. Ah ? Un boiteux. Un claudiquant. Celui qui marche au pas de l’oie. Comme saint Roch sur le chemin des étoiles, le saint patron des chirurgiens, comme Pythagore au genou d’or, les maitres du feu et de la forge, comme celui qui, à cloche-pied, envoie son palet sur la Marelle, l’ancienne Mérelle, la Mère de El, la lumière. Ils ont tous parcouru le chemin initiatique, se rapprochant de la pierre philosophale, de la connaissance ultime.
Revenons à Chiron. Le poison lui causant d’horribles souffrances, ne pouvant mourir, il demanda la permission d’offrir son immortalité à Prométhée, celui qui apporta la connaissance aux hommes.
Zeus fit alors de Chiron une constellation.
Le centaure portant l’arc devient la représentation du Sagittaire (qui signifie « archer »), neuvième signe du zodiaque, dernier signe de l'automne. Le centaure-sagittaire peut être représenté flèche en arrière, en avant, ou au-dessus (les 3 décans du signe du Sagittaire).
La flèche devient le symbole de la destinée : en la lançant, le centaure manifeste sa volonté de choisir sa cible. La flèche vise dans le ciel la constellation du Capricorne derrière elle, le Scorpion devant elle, puis elle remonte sur le Serpentaire pour aller jusqu’au Serpent et à l’Aigle au-dessus.
A noter que le Serpentaire, qui divise le Serpent en deux, est représenté par un homme portant un serpent autour de lui et représenterait Asclépios, qui fut éduqué par Chiron.
Ces trois positions du Centaure-Sagittaire peuvent se rapporter aussi à la triple nature humaine, corps-âme-esprit : arrière-avant-dessus. La flèche, de nature ignée comme la foudre, finalement ne visera autre chose que le centaure lui-même, le centre de son être. (Sagitta dérive du verbe latin sagire qui signifie percevoir rapidement)
Le centaure est parfois représenté sur les chapiteaux romans entouré de pommes de pin. Grasset d’Orcet dans son livre «Matériaux cryptographiques» nous explique que le centaure et la pomme de pin se lisent « centur leupin », vulgairement saint Turlupin, monogramme des compagnons bâtisseurs du moyen-âge. Saint Turlupin contient aussi les noms de quatre dieux gallo-gothiques, ou du cycle de Thor, à savoir: “Can”, le chien; “Tur”, le taureau; “Leu”, le loup, et “Pen”, l’orfraie.
Amusant d’ailleurs de voir comment la religion du livre traite ces animaux : « Le Lévitique - 11 - 13 : Voici, parmi les oiseaux, ceux que vous tiendrez pour immondes; on n'en mangera pas, c'est chose immonde : le vautour-griffon, le gypaète, l'orfraie». Le loup est traité de méchant prédateur, le chien de vil animal et le taureau ne sert que pour les sacrifices.
Le centaure dans les chapiteaux romans est souvent représenté avec un adversaire vil ou dérisoire, comme un lapin (que l'on retrouve sur une poterie grecque)....
Nous retrouvons notre saint dans le troisième couplet d’Au clair de la Lune :
Au clair de la lune,
L'aimable Lubin,
Frappa chez la Brune,
Qui répond soudain :
Qui frapp' de la sorte ?
Il dit à son tour :
Ouvrez votre porte,
Pour le dieu d'amour
A son tour, Lubin ? Qui frappe chez la Brune, pour l’Amour. La Brune, la Noire, la Dame de sous terre ? Lubin serait alors son parèdre, Michel ?
Nous retrouvons aussi saint Lupin dans le nom du héros de Maurice Leblanc, Arsène Lupin. Le jars, ou mâle de l’oie, se prononce en grec arsenic cana. L’arsenic (ou sel des philosophes), indispensable au grand œuvre alchimique. Ou Ar (préfixe latin d’addition, de renforcement) Sène (saint) Lupin, le grand saint Lupin.
http://misraim3.free.fr/divers2/esoterisme_dans_les_contes.pdf