L'abbatiale d'Arles-sur-Tech
La première mention connue d’Arles concerne l'église Sant-Pere-de-Riuferrer, appelée au IXème siècle Sancti Petri in Arulas. Ce nom d'Arulas, qui a donné Arles, a suscité de multiples interrogations, mais on admet dans l'ensemble qu'il signifie "petits autels" (latin ara = autel), et qu'il pourrait être lié au culte des nymphes (ou autres divinités) pratiqué aux Banys .
L'abbaye bénédictine d'Arles, au cœur du Vallespir, est l'une des plus anciennes abbayes carolingiennes fondée en Catalogne, aux premières heures de la reconquête de Charlemagne (778-780).
A sa fondation par l'abbé espagnol Castellanus, l’abbaye primitive s'installe dans les ruines de thermes romains situés à l'emplacement de l'actuelle Amélie-les-Bains. Au IXème siècle, vers 881, à la suite des terribles incursions normandes, recherchant une plus grande sécurité, les moines transférèrent l'abbaye sur le site actuel, sous la direction de l'abbé Suniefred, membre de la famille comtale du Roussillon.
Cette protection de la famille comtale, puis celle des comtes de Barcelone et des rois d'Aragon qui leur succédèrent, assure privilèges, protections et donations de saintes reliques. De nombreuses donations assurent à Sainte-Marie d'Arles un essor tout particulier, la plaçant aux premiers rangs des abbayes catalanes du moyen-âge.
En 960, l’abbé Arnulfe la dote des reliques des saints Abdon et Sennen, obtenues du pape lui-même, et qui vaudront à Arles le surnom de "ville des Corps Saints". L’église subit un agrandissement du temps de l’abbé Sintillus (980-1001). Puis vint une période de grands travaux qui réalisent quasiment l’édifice actuel, consacré en 1046.
Autour de 1150, l’abbé Raymond 1er consacre 6 églises relevant de Sainte-Marie. Cette dernière est consacrée une deuxième fois en 1157. Dans le dernier quart du XIIème siècle, l’abbé fait construire un mur d’enceinte avec barbacane et tours. En 1260, l’abbé Raymond Deç Bach construit le cloître, à partir du marbre blanc de Céret et de calcaire gris à numulithes de Gérone pour les colonnettes.
A la fin du XIIIème siècle, l’église est agrandie de chapelles gothiques qui donnent sur les collatéraux. Les chapelles du nord sont surmontées au XIVème siècle d’un nouveau toit qui repose sur le mur de la nef centrale au-desus des fenêtres. Ainsi, l’église est privée d’une partie de son éclairage primitif. A la fin du XIVème siècle, les moines de l’abbaye sont sécularisés et vivent de leur bénéfice perdant en même temps l’idéal de Saint Benoit. Comme de nombreuses abbayes, Sainte-Marie connaît une longue et lente agonie.
A la révolution française, les six derniers moines quittent le monastère, et l'abbatiale devint l'église paroissiale du village tandis que ses biens et dépendances sont vendus. Signalons quand même que tous les 30 juillet a lieu la fête patronale, avec pour point d'orgue la procession de la Rodella (roue dans laquelle est entouré un long fil de cire). Cette tradition fut créé au XVème siècle et elle est toujours en vigueur aujourd'hui.
L'église est une construction à trois nefs, de type basilical, qui présente une particularité fort rare : son chevet est tourné non vers l'est, mais vers l'ouest. A l’origine, elle était couverte d’une charpente. Voûtée en berceau brisé au XIIème siècle, elle a été embellie de chapelles latérales aux XIIIème et XIVème siècles. Intérieurement, le mur de façade reçoit trois absides d'un mode architectural carolingien.
Les fresques du XIIème qui ornent l'abside de la chapelle haute présentent un Christ en majesté entouré des 4 évangélistes et au-dessous deux figures d'anges.
Des armoires à reliques sont creusées dans les piliers de la deuxième travée. Elles servaient à garder les reliques de saint Abdon et saint Sennen.
La façade comporte un portail avec un linteau de granit en forme de bâtière, portant l’alpha et l’oméga et les lettres AA. Il appartient peut-être à l’église du XIème siècle.
Le décor sculpté dans le tympan est lui du XIème et représente un Christ en gloire entouré des symboles des évangélistes, ce que l’on appelle les 4 vivants.
Au-dessus, au sommet de la façade, une série d’arcatures caractéristiques du style lombard du premier art roman, ensemble de dix grandes baies cintrées dont deux seulement sont à claire-voie. Cet ensemble est surmonté par un pignon orné d'une galerie d'arcades aveugles.
La contre–abside de l’église possède une chapelle haute située au-dessus du portail, où l’on accédait par un escalier à double volée. Cette chapelle est dédiée à saint Michel et aux archanges. Elle est décorée de fresques du XIIème siècle.
Les tours de défense du XIème siècle étaient au nombre de 4 : à l’ouest les deux clochers de l’église (un seul subsiste) , à l’ouest les deux tours de défense qui encadrent le parvis.